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OH PARDON ! TU LISAIS...
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8 février 2023

« L’IDOLE » de Serge Joncour

L'IDOLE-Serge Joncour

Éditions Flammarion – 2004 – 242 pages-

Aujourd’hui esseulé… Demain idolâtré ? Ou l’inverse ??? Aïe aïe aïe… 

PITCH : Un roman aussi hilarant que grinçant et cruel, une sorte de fable d’un naïf en proie aux médias manipulateurs. Un homme face à lui-même, devant gérer une soudaine et absurde célébrité…

RÉSUMÉ : Un matin, Georges Frangin –un type transparent, seul, chômeur, sans perspective –est regardé dans la rue comme une star et chacun le reconnait ! Désormais, le voilà admiré, envié et même considéré comme une star hautaine, lui qui en fait s’interroge s’il est dans un rêve ou la réalité. Il se retrouve sur les plateaux télé à faire la promo de son livre (mais quel livre ???)… Passé l’étonnement, le célèbre, adulé, presque auréolé ancien looser apprend vite à jouir de cet état d’idole fabriqué sur mesure, mais ô combien stressant et incertain dans le temps…

 

 MON AVIS : Serge Joncour écrit ce livre en 2004 et plus que jamais il est d’actualité. Le puissant lobby des médias choisit ici un type docile, au quotidien peu enviable, et s’amuse à le transformer en star. La pipolisation bat son plein dans notre société capitaliste, mais elle a besoin, pour prospérer, de nourriture, à savoir, du « people » nouveau, original qui rapporte. En lisant ce roman, j’ai visualisé un laboratoire avec le pauvre Georges Frangin sous la forme d’un rat. Et oui ! Cet inconnu va servir d’expérience pour le profit d’autrui… D’ailleurs, dixit le boss de la chaîne TV: » Pour l’heure, je ne saurais vous dire si votre parcours relève du pathétique ou du remarquable… » On l’a donc bien testé ! ». Car Frangin n’a strictement rien fait pour mériter sa couronne de gloire : pas de talent artistique ou littéraire, aucun don particulier ayant mené à réussite, et aucun acte héroïque…

 

L’auteur a choisi un nom incroyable à son personnage : Frangin. Serait-ce dans le but que nous l’acceptions immédiatement dans notre sphère intime, comme un frère, un égal de nos moments douloureux de vie ? Nul doute, la vie ne lui sourit sur aucun plan. « Ce désastre ascensionnel qu’est ma vie ». Pas de boulot, pas de vie amoureuse, pas de famille, pas d’argent, pas d’ambition mais beaucoup de spéculations et de scènes anticipées. Un clin d’œil à ce cher J.J. Goldmann ? « Elle vit sa vie par procuration, devant son poste de télévision »… Quant au nom angélique du grand boss de la chaîne télé… Raphaël, l’auteur ne l’a sûrement pas choisi au hasard. Raphaël signifie « Dieu guérit »… Un p’tit clin d’œil ironique à la pseudo- guérison de Georges Frangin ?

 Frangin s’est construit sur le manque, et Joncour le ramène à son enfance sous forme de flashbacks réguliers. Frangin réfléchit aux événements de sa vie d’enfant qui pourraient être à l’origine de la star qu’il est devenu depuis quelques jours, lui l’habituel perdant. Lui, le gosse qui se faisait remarquer, en toutes situations, mais surtout en mal, comme les adultes aimaient à lui faire remarquer… Le pauvre y voit la trace de sa célébrité au lieu d’y comprendre les raisons des nombreux cassages de gueule de sa vie d’adulte ! Quelle proie idéale il offre aux médias : naïf et manipulable à souhait. Il n’a jamais rien choisi dans sa vie. Et voilà qu’on lui apporte une gloire surprenante sur un plateau. Il y prend très vite goût, mais se sent saturé par trop d’admirateurs. Pourtant il est déjà gloire-addict… Alors la pression s’installe par peur de perdre cette reconnaissance enfin acquise, lui qui a manqué. Mais inconsciemment, il va tout faire pour perdre ces nouveaux acquis ! « Dans le fond, c’est cruel de ne pas être reconnu dès lors qu’on se sait célèbre. Je dirais même que c’est blessant ».

 

L’écriture parfois délirante de Joncour est pleine de jeux de mots façon Devos. Il habille ses moqueries d’un manteau de mots gentils, rendant le tout déstabilisant et délicieusement absurde. Jamais il ne lance de polémique, il interroge plutôt en chacun de nous cette dualité obscurité /lumière et comment nous pouvons naviguer entre les deux en fonction de la place que la société nous attribue. Comment évolue un être insignifiant perdant sous le feu des projecteurs ? Un phare dans la nuit ou une boule de feu prête à tout ravager ? « J’étais fait pour être génial. Avant, les artistes étaient des gens qui gagnaient à être connus, alors qu’aujourd’hui ils cherchent simplement à l’être ».


 

LA DRÔLE D'ORDONNANCE DE LA PSY ET COACH EN HERBE : Voici un jeu ! À quoi pourriez-vous vous identifier ?

–Au gagnant anonyme au loto ?

–à la STAR style Catherine Deneuve ? Une star créée de la richesse, elle se vend, est vendue sous forme d’image ou produits dérivés et rapporte… Et quand elle a vaincu un passé douloureux, elle vaut encore plus cher !

–Au HÉROS MYTHIQUE style Ulysse, Achille, Moïse ? Le héros mythique a des qualités humaines +++ et joue un rôle dans l’ordre social d’une société. Il aide l’enfant à se réparer et Boris Cyrulnik explique combien il est même un remède contre « l’humiliation historique d’une nation ».

–Au SUPER HÉROS style Superman, Wonderwoman ? Le super héros est fasconné pour faire rêver, nous permettre de développer nos dons cachés et notre valeur.

–à l’IDOLE VIRTUELLE qui investit aujourd’hui l’espace numérique, un Georges Frangin 20ans plus tard ?


 

LE CONSEIL DU MATOU CHARLY, INTELLO MAIS PAS TROP : Bon, moi je suis un peu tout à la fois : le héros, la star, l’idole de mon humaine. Je suis un mythe à quatre pattes, poilu comme devait l’être Achille, beau comme l’était Alain Delon, drôle comme Omar Sy… Et comme le montre Boris Cyrulnik, les animaux peuvent sauver littéralement leur humain de compagnie en lui rendant son humanité, en lui apportant « les substituts maternels ». En retour l’humain les protège. C’est beau, non ?


 

Vous avez apprécié ? Alors lisez un de mes romans coup de cœur : « Super normal » de Robert Mayer (éditions aux Forges de Vulcain) et « Ivres paradis, bonheurs héroïques » de Boris Cyrulnik (chez Odile Jacob).

 

 

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Commentaires
J
Résolument gagnante anonyme du loto. Je n'ai aucune résistance à la pression et n'aime rien tant que vivre en-dehors des regards (tenir un blog peut alors sembler paradoxal ; j'imagine qu'il y a une petite part de moi qui apprécie tout de même de s'exposer un peu, sans trop de risque, sans trop de public, et en gardant sa part d'anonymat, avec la possibilité de disparaître du jour au lendemain...)
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M
Et pourtant... pour vivre heureux, vivons cachés ? Ce livre ainsi raconté, est bien intéressant ! Il pose aussi la question d'une certaine société occidentale actuelle. Du Big Brother à la Rollex , beaucoup de bling bling qui sonnent creux dans notre civilisation. Alors oui, l'idole ainsi décrit doit être bien amusant à découvrir. Merci Oh Pardon Tu Lisais !
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