« JAMAIPLU » de Josiane Balasko
Éditions Pygmalion – rentrée littéraire 2023 – 259 pages- Nouvelles-
MERCI Josiane Balasko, merci, merci pour ce moment de rêve et d’évasion, de frissons et d’émotions !
PITCH : Huit nouvelles déjantées dont la première, Jamaiplu , a donné son titre au recueil. Un régal, synonyme pour moi de lâcher-prise : j’ai enfin pu ficher la paix à mon mental, j’avais trouvé plus dingue encore, parfois si drôle et absurde, parfois terrifiant, à me faire oublier mes propres angoisses… Je vous recommande la méthode Balasko !
MON AVIS : Balasko incarne l’artiste libre, vraie, sans autres limites que celles de son esprit prolifique et surdoué. Je suis très admirative de son travail et j’avoue découvrir ses écrits. Nous connaissons tous ses textes mis en scène au théâtre et au cinéma, comme « Le père Noël est une ordure » ou « Cliente ». Durant sa jeunesse, elle s’est nourrie de Fantastique, de Science-Fiction et visiblement, Ray Bradbury, Ursula Le Guin et autres, ont planté des graines dans un terreau fertile.
Dans plusieurs de ses nouvelles, l’autrice accorde une place prépondérante à la communication de l’humain avec l’animal ou le végétal. Ainsi dans Jamaiplu , la nouvelle la plus longue (environ 70 pages), les différents animaux intelligents, bienveillants et altruistes vont contrebalancer avec la cruauté humaine. Car nous sommes en plein thriller fantastique, stressant, cruel et émouvant. On a la trouille et on serre les fesses ! « Les animaux ne mentent pas » : voilà le message de l’histoire, l’animal, lui, n’est pas fourbe, ne dissimule rien. Il est, c’est tout, et c’est déjà beaucoup.
Dans Faites pousser un extraterrestre, un de mes coups de cœur, la communication est encore plus surréaliste, car le personnage principal parle avec sa plante dont les bourgeons éclos ressemblent à des petites têtes qui n’ont pas la langue dans leur poche. « On se les caille dehors » dit celle qui se fait appeler Lulu ! Lui qui avait juste planté des graines issues d’un Pif Gadget, avec la promesse à peine crédible de récolter un extraterrestre ami ! « Il lui fallait accepter le fait de vivre en compagnie d’une espèce de broccoli multitêtes qui donnait son avis sur tout ».
Balasko parodie la société de manière trash, sans masques, parfois osée. Le style de langage correspond au style des personnages, elle utilise la méthode directe, appelle un chat un chat et recourt au familier quand l’histoire s’y prête. La prose est efficace. Dans Les explorateurs, les fantômes ont l’esprit goguenard, ils font tourner en bourrique les vivants et se lâchent, leur pétant même au nez.
La tendresse est au rendez-vous, comme dans Le Boss, un texte tellement émouvant. Un chien nous parle de son maître qu’il vénère. « Et il sent tellement bon. Même lorsqu’il se met de l’eau de toilette, il sent encore bon. Une odeur de cuir, de vieux cuir qui a travaillé, avec de la sueur dans les chaussettes. » Un ton naïf, un peu enfantin, tellement sincère. Ah oui, bien sûr, je parle là des attributs du chien, qui raconte son aventure de vie !
Adopte un zombie.com nous plonge dans un récit de SF, une histoire abracadabrantesque dans laquelle après leur mort, les zombies, vivant à nos côtés, seraient en quête de sucre et de…câlins ! En gros, même dans la vie après la mort, on rechercherait désespérément de la tendresse. Et les vivants vont s’empresser de punir ces demandes: peine de mort pour qui cherche cette tendresse. Une histoire géniale d’inventivité et de réflexion sur la vie après la mort et la manière de traiter son prochain, au niveau personnel et sociétal.
Partout chez Balasko, le surnaturel surgit dans un récit des plus réalistes. Cet effet bouleverse le personnage, le fait hésiter, avoir peur, douter ou se rebeller, et alors nous sommes en plein Fantastique, comme dans Faites pousser un extraterrestre par exemple, où le personnage consulte un psy suite à la conversation avec la plante ! Alors que dans le Merveilleux, les règles du monde magique sont claires dès le départ, et ni les personnages ni les lecteurs ne s’étonneraient devant les événements surnaturels. Vous verrez, vous ne serez aucunement surpris de savoir que dans le Boss, le narrateur, c’est le chien… (J’avais écrit "l’auteur", vous voyez, chez moi, c’est même logique…)
LE CONSEIL DU MATOU CHARLY, INTELLO MAIS PAS TROP : c’est quoi ces histoires de littérature Fantastique ??? Il n’y a rien de surnaturel à communiquer avec les animaux humains ! Ma binôme chroniqueuse et moi, nous discutons livres à notre façon : elle a appris mes codes, tout simplement. C’est L’ADAPTATION. Sinon, comment pourrait-elle retranscrire mes avis de lecture, hein ? Je ne suis pas du genre à taper sur un clavier d’ordinateur, moi, je me contente de taper sur des bambous, et c’est numéro 1 ! J’apporte la matière grise, la réflexion, quoi, et elle, s’amuse à pianoter. Vous voilà dans nos secrets de famille…
LA DRÔLE D’ORDONNANCE DE LA PSY ET COACH EN HERBE : L’imagination, le rêve, le monde du « Fantastique » permettent d’envisager d’autres mondes, des relations à l’autre différentes. Les abrutis, les assassins existent bien, pourquoi pas les zombies, les extraterrestres, les êtres vivants communiquant leur tendresse ? Mark Twain que j’affectionne particulièrement, différencie, dans Cette maudite race humaine, les animaux humains des animaux supérieurs, ces derniers non dotés de sens moral mais qui pourtant ne font pas le mal. À méditer…
Vous avez apprécié ? Alors lisez Edgar Allan Poe, le poème Le corbeau, traduit par Charles Baudelaire, et Mark Twain, N°44, le mystérieux étranger.