Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
OH PARDON ! TU LISAIS...
OH PARDON ! TU LISAIS...
  • Blog littéraire pour partager mes avis de lecture, pour parler des auteurs-autrices, leurs livres, leurs maisons d'éditions, leur passion et la mienne : l'écriture. Les bienfaits de la lecture sont magiques. Je souhaite à chacun le bonheur de lire.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Newsletter
Archives
Derniers commentaires
19 mars 2023

« TOMBER » de Carlos Manuel Alvarez

TOMBER

 Éditions Mémoire d’encrier – Juin 2022 – 165 pages- Traduit par Éric Reyes Roher- Illustration de Labrona-

 

Une famille, un quartier, un État, un pays : Cuba, lors de ses terribles années 1990…

 

PITCH : un roman polyphonique où fils, mère, père, fille, nous plongent tour à tour le nez dans l’intimité poisseuse de leur famille prête à s’effondrer. De nombreux flashback dans les souvenirs de chacun nous font voyager une dizaine d’années en arrière, au cœur de la pauvreté et du manque de la fin de l’ère communiste.

 

RÉSUMÉ : Le Cuba des années 1990, avec sa pauvreté, ses privations et restrictions, sa répression, va révéler des visages peu reluisants au sein de cette famille de la classe moyenne dans laquelle désormais chacun devient l’ennemi de l’autre, en plus d’être le sien. Un père communiste abruti par ses croyances, une mère malade sur le déclin, un fils aigri qui crie revanche et une fille dont la propre vie ressemble à la gestion des crises des trois autres… Plus rien à voir avec l’utopie révolutionnaire du Che Gevara…

 

 MON AVIS : le jeune auteur, déjà écrivain incontournable du continent sud-américain, voit le jour en 1989, début de la « période spéciale en temps de paix » à Cuba, quand l’URSS s’effondre, avec des conséquences dramatiques en termes de pauvreté, de rationnement en tous genres. Il choisit de donner quatre voix principales à son roman, apportant ainsi une diversité des avis, des ressentis. Le roman choral est un exercice fascinant pour le lecteur, qui, forcé de s’identifier tour à tour aux différents protagonistes, doit changer de regard sur l’altérité. Pas de répit pour le lecteur !

 

Chaque lecture me mène à visualiser. Pour ce roman, j’ai imaginé un vortex dans lequel papa, maman, et les deux enfants seraient engloutis, emportés désespérément dans la spirale, se cognant au passage, se blessant, et se noyant eux-mêmes dans leurs contradictions et leurs non-dits. Et l’océan qui fait tourbillonner diaboliquement cette pauvre famille, c’est le pays lui-même, qui à force d’injonctions, d’ordres, d’abrutissement, de privations, se joue de tous ces civils qui tombent malgré eux. Quelle famille ne se noierait pas ?

 

Le premier chapitre du livre s’ouvre sur DIEGO, 18ans, forcé de faire son devoir militaire, avec au-dessus de la tête, l’épée de Damoclès d’une guerre assez probable… Jeune, intelligent, doué à l’école, attendant de son père une preuve d’amour, à savoir faire marcher son réseau pour lui éviter la dure vie de caserne. Mais la reconnaissance, il semble destiné à la chercher en vain, lui le jeune déçu, aigri, défaitiste. « Le laps de temps dont dispose un homme pour se rater ou s’en tirer est très court, et se situe communément à l’âge de quatorze, quinze ans, où il n’en a pas conscience, ne sait rien de ce qui se joue en coulisses ». Si jeune et déjà convaincu qu’un sillon est tracé pour chacun, et qu’en dévier serait peine perdue ! » j’ai cherché partout la bonté mais je n’ai trouvé que déliquescence ».

Avec sa mère, MARIANA, on a froid dans le dos. Hier encore professeur, aujourd’hui atteinte de convulsions huit fois par semaine, et le déclin physique qui va avec les nombreux accidents et donc blessures. L’énergie et l’inventivité de cette femme ont fait place à l’épuisement, au silence, au renoncement. « Ne pas nommer, ne pas dire, ne pas éclaircir, ne pas pouvoir. Ce soir-là, j’ai dormi en toute quiétude, abritée par la maladie. »

Quant à ARMANDO, le père, j’ai eu envie, durant ma lecture, de l’attacher à une chaise et de le baffer ! Infernales, ses pensées bien-pensantes, toujours impeccables, ses principes et son idéalisme, son code moral du communiste honnête, altruiste… Positif et optimiste, plein d’énergie pour aider autrui et refuser tout cadeau ou tout passe-droit, un parangon de vertu qui a juste oublié qu’une famille a besoin de manger, et qu’en des temps pareils, il faut mettre sa débrouille au service des siens. « Armando s’opposait à ce que les biens de l’État, comme il aimait dire, soient utilisés à des fins personnelles ». L’homme est obnubilé par le népotisme qu’il récuse bien sûr, jusqu’à chercher à licencier sa fille du propre hôtel qu’il dirige !!! L’enfer est vraiment pavé de bonnes intentions…

Alors MARIA, 23ans, va bien devoir agir, si son père nonchalant et aveuglé par son idéologie ne remplit pas leurs assiettes ! Lourde tâche pour une jeune fille que de tenir dans sa main la survie d’une famille…


 

LE CONSEIL DU MATOU CHARLY, INTELLO MAIS PAS TROP : je suis un chat tendre et délicat, comme vous le savez maintenant, mais j’avoue qu’avoir posé sur mes pages Facebook et Instagram, un cigare au bec sur fond de musique cubaine, style Che Guevara revisité matou macho, quel kif ! Dans ce roman j’ai appris qu’il aurait refusé la bicyclette qu’on voulait offrir à sa fille en cadeau, car les bicyclettes appartenaient à l’État et donc au peuple ! Belle intention mais quand il est photographié avec un gros cigare, alors là, le cigare (luxueux donc cher) n’appartient ni à l’État ni au peuple ??? Tiens donc… Dans ma maison, tout m’appartient. Voilà, c’est plus simple ! Je suis donc à la fois l’État, le peuple, la famille, et moi-même !!!


 

LA DRÔLE D’ORDONNANCE DE LA PSY ET COACH EN HERBE : « On a gardé tout ça à l’intérieur, comme un hématome, qui en s’infestant nous a rongé dans le silence ». Revoilà mon sujet favori, les non-dits et les conséquences sur plusieurs générations ! Car dans le fond, nous venons au monde certes nu, mais avec un sacré sac à dos invisible et pourtant bien présent. Et parfois, ce baluchon est inconnu de nous, mais connu des autres qui s’en serviront d’arme, et alors là, vogue la galère…


 

Vous avez apprécié ? Alors lisez un autre roman familial polyphonique, « Le vertige des falaises » de Gilles Paris. Ou encore la série des cinq petits livres de la japonaise Aki Shimazaki « Le poids des secrets ».

 

 

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité