MA TEMPÊTE d’Éric Pessan

Éditions Aux forges de Vulcain – 133 pages – Août 2023

 ORIGINAL- POÉTIQUE- TENDRE

PITCH : le duo Pessan (XXIème siècle)/Shakespeare (début XVIIème) autour du texte « La tempête « de ce bon vieux William est étonnant ! David met en scène pour et avec sa petite Miranda de deux ans ce fameux texte de théâtre lors d’une journée d’orage, alors qu’il ne digère pas le fait que toutes subventions pour sa pièce lui aient été refusées, que son projet soit donc mort-né et que lui, se noie peu à peu dans un sentiment d’échec et de non-reconnaissance.

MON AVIS : Un roman vraiment original sur la culture, la paternité, la vie souvent « enchaînée « et précaire des artistes mais belle et bourrée de sens !

De nos jours on prénomme les tempêtes. Désormais, Éric Pessan aura la sienne ! Il appelle son texte « Ma tempête », sur proposition de son éditeur, mais ce sont en fait plusieurs tsunamis qui assaillent le narrateur alors qu’il s'apprête à jouer avec sa fillette la pièce de Shakespeare dans l’appartement familial.  William aussi avait la sienne, de tempête, écrite en 1610 !

Ce déluge-là, qui déchire le ciel en cette journée d’orage avec pluie battante et vent délirant, remue tout autant son être intérieur, avec ses émotions prêtes à déborder.

David est un papa comblé, il aime créer des souvenirs avec cette petite dont le prénom, Miranda, est celui de la fille de Prospero dans « La tempête », cette enfant qu’il éduque aux arts, à qui il transmet son amour pour le théâtre et les beaux textes. Aujourd’hui, tous deux inventeront une mise en scène étonnante, faite de dessins, de peluches et de Playmobils. Leur complicité est évidente, cet amour partagé agit comme un remède à ses souffrances intérieures, à ses blessures familiales.

Car ses blessures sont à vif, David ressent tristesse, colère, vide... et précarité. Et sa colère contre le traitement réservé au monde culturel français le révolte : des artistes que l’on voudrait des produits rentables, dépendants des distributeurs de subventions qui favorisent les artistes déjà connus, mis à l’écart si leur art ne divertit pas assez l’humain d’aujourd’hui et ne fait pas exploser l’audimètre ! L’artiste peut-il vivre de son art ?  « La culture pensée comme un divertissement sans importance et jamais comme une émancipation, comme une émotion et surtout pas comme un effort. » Mais du temps de Shakespeare, était-ce vraiment mieux, alors qu’il fallait un protecteur riche, qu’il fallait surprendre par l’originalité tout en prenant garde à la censure ? « Les théâtres dépendent de l’humeur des rois, de l’état de santé des sociétés, ils sont les premières victimes de toutes les épidémies. »

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 LA DRÔLE D’ORDONNANCE DE LA PSY ET COACH EN HERBE : Si ce roman parle théâtre depuis ses origines, il parle aussi imagination, donc créativité, capacité à rêver, à inventer, à jouer, à mettre en scène. Voilà le point commun au papa et à sa fillette, la force du rêve éveillé, la capacité à jouir d’une certaine lenteur alors que notre société rejette tout immobilisme. De rêvasser ne sont capables que les êtres qui débranchent une partie de leurs ondes cérébrales au profit des ondes alpha, et pour cela, l’adulte doit « débrancher » son cerveau alors que chez l’enfant, ces ondes sont majoritaires. Pessan et Shakespeare seraient-ils de grands enfants qui inventent et fabriquent leurs jouets ? « Le poète écrit une chaise sur laquelle ensuite on peut s’asseoir. »

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LE CONSEIL DU MATOU CHARLY, INTELLO MAIS PAS TROP : et moi, les jours de pluie, je rêve des canapés avec couvertures moelleuses pour chasser la tempête de chez moi !