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OH PARDON ! TU LISAIS...
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30 septembre 2023

PORTRAIT HUACO de Gabriela Wiener

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 Éditions Métailié – 158 pages – Rentrée littéraire Août 2023 --- sorti en 2021 en V.O --- Traduction de Laura Alcoba

 

L’héritage colonial en lien avec l’héritage familial et l’équilibre de vie des générations suivantes…

 

PITCH : Une fine analyse sur les bouleversements de tous ordres pour les générations qui suivent la colonisation (amour, estime de soi, filiation, choix sexuels, légitimité…), surtout quand un colon fait partie des aïeux ! Une narratrice qui devient presque à elle seule l’Empire Inca dans sa dimension d’émancipation coloniale.

 

 RÉSUMÉ : C’est dans la salle « Charles Wiener » du musée du quai Branly dédiée aux statuettes « huaco » que la narratrice croit littéralement se reconnaitre ! Commencent alors des recherches sur ce fameux aïeul, explorateur pilleur de tombes du XIXème siècle, homme à l’origine d’une lignée bâtarde au Pérou. La jeune femme plonge dans l’époque coloniale pour tenter de mieux comprendre combien les secrets et agissements racistes ont impacté ses orientations de vie (polyamour, bisexualité) et sa personnalité (jalousie, sentiment d’abandon, solitude). La mort de son père la plonge également au cœur d’un secret…

 

MON AVIS : à l’origine de toute cette histoire était la colonisation : « Le colonialisme frappe toujours dans une direction et sans consentement. »

Gabriela Wiener, journaliste péruvienne, vit à Madrid où elle est reconnue pour ses nombreux écrits. Elle signe là son premier roman, une auto-fiction peut-être plus qu’une autobiographie, dans une langue crue et provocatrice, animée par une colère qui devient rage.

 

Cet ancêtre, c’est Charles Wiener, à l’origine un prof d’allemand juif autrichien qui obtiendra la nationalité française après avoir été mandaté en 1876 par l’État français pour des fouilles archéologiques. Le type est prétentieux, hautain, raciste, ramènera du Pérou un enfant acheté, participera de ces zoos humains au moment de l’exposition universelle (« Comme une sorte de Disneyland du colonialisme »), sera diplomate, écrira, et aura… presque trouvé le Machu Picchu, mais pas tout à fait ! Et se sera reproduit là-bas avant d’abandonner femme et progéniture…

 

Comment se construire paisiblement quand on est issue d’un tel homme, dans un tel système de pensée, de valeurs ? « C’est étrange, la façon dont dans cette famille, durant tant d’années, on a réussi à faire cohabiter la fierté du patriarche et la honte de l’abandon dans un seul geste. »

Gabriela est un véritable mélange de mondes et de couleurs, avec pour lien la pauvreté des deux lignées, mais elle précise que la couleur est de loin ce qui fera la différence ! Comme quoi, il y a des pauvres moins pires que d’autres…

 

On retrouve tout le long du livre la sensation d’un pillage de l’identité qui la mène à douter d’elle-même, à ne pas se trouver belle car la norme est blanche, à devoir sans cesse se justifier, notamment en Espagne où les femmes d’Amérique latine sont vues systématiquement comme des femmes de ménage.

 

Elle choisit inconsciemment une arme pour résister à sa condition de femme indigène métissée, ce sera le sexe. Tout au long du livre elle parle de son couple en polyamour, vivant avec un mari sudaméricain et une femme espagnole. Bisexuelle, féministe cherchant à décoloniser son désir, artiste, activiste, métisse indigène, la tâche n’a rien de simple et Gabriela souffre de sa jalousie, de ses peurs d’abandon et de vide, de sa dépendance affective, de sa difficulté à se tenir aux règles de ce trouple (couple à trois) qu’elle a pourtant choisi. Ça sent souvent l’auto sabotage et le sexe qu’elle voudrait voir remplacer l’estime de soi déficiente ! « …ce qui nous arrive à nous, corps racisés, à cause du commandement qui veut que les corps désirables soient les corps blancs, minces et normés, tandis que nous méprisons ce qui nous ressemble. Je connais la théorie ! Mais putain, comment la faire comprendre à mon corps ? »

 

Dans ce livre, les liens établis entre dégâts coloniaux et dégâts familiaux sont subtils. J’ai un peu moins adhéré au langage sexuel parfois vraiment cru, dans ces moments-là peut-être je ressentais vraiment trop violemment son mal-être et son autodestruction inconsciente. Certes, ce n’est finalement presque plus elle qu’on écoute, mais elle dans sa dimension de représentante de tout un peuple déchiré et meurtri.


 

LE CONSEIL DU MATOU CHARLY, INTELLO MAIS PAS TROP : Nous, les chats, devons faire face à la « supériorité » de notre compagn.e(on) qui parfois nous traite comme des gosses, sait tout (ou le croit)… Quand je pense qu’ils ne savent même pas attraper une souris… Luttons pour une belle cohabitation des espèces humaines et animales, les ami.e.s ! (ça va pas être simple, vu que les humains se bouffent déjà le nez entre eux…)


 

LA DRÔLE D’ORDONNANCE DE LA PSY ET COACH EN HERBE :

« Ma propre escalade dans l’expérience violente de la peur trouve son origine dans le traumatisme. »

Faut-il vraiment plus en dire pour comprendre les origines de beaucoup de nos peurs ? Les traumatismes sont vicieux, pervers, ils œuvrent en profondeur, ravageant tout sur leur chemin, agissant dans le temps, comme s’ils avaient été tatoués sur nos cellules. Ils se transmettent de générations en générations, sur le long terme, et brouillent leur trace avec le temps ! L’autrice a choisi d’enquêter, de remonter le(s) chemin(s) des traumatismes de sa lignée afin de mieux comprendre ses doutes, difficultés, peurs, tristesses, ses dérives qui reproduisent un schéma aussi. Elle se saisit de sa colère comme d’un fil d’Ariane contre ce colon-ancêtre.

Nous avons tous un fil de soie à suivre pour retourner jusqu’au ver à soie… Tous !

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